Auteur : Jordy De Decker (Vandelanotte)
Cet article aborde quelques sujets fiscaux liés à la rémunération des dirigeants d’entreprise. Nous aborderons dans un premier temps la requalification des revenus immobiliers en rémunération. Nous discutons ensuite des enjeux entourant la théorie de la rémunération. Nous abordons enfin le statut fiscal du représentant permanent d’un administrateur personne morale.
Tout d’abord : qu’est-ce qu’une rémunération de management ?
Toute rémunération accordée ou accordée à une personne physique au titre de sa qualité d’administrateur ou de gérant est considérée comme une rémunération des dirigeants de la société. Ces rémunérations comprennent des indemnités, primes et avantages de toute nature, et sont imposées au taux progressif de l’impôt sur les personnes physiques.
Reclassement des revenus immobiliers en rémunération
Une situation courante est qu’un gérant loue son bien immobilier à l’entreprise dont il est gérant. Cela ne pose pas de problème en matière d’impôt sur le revenu des personnes physiques, puisque tant les revenus immobiliers que les rémunérations sont imposés progressivement. L’enjeu se situe dans le domaine de la sécurité sociale, où seule la rémunération est prise en compte pour le calcul des cotisations sociales à payer.
Afin d’empêcher les chefs d’entreprise d’éviter les cotisations sociales en échangeant leurs salaires contre des revenus locatifs plus élevés, une mesure anti-évasion a été introduite. Cette mesure signifie que les revenus locatifs sont limités à 5/3 du revenu cadastral réévalué. La part dépassant cette limite est considérée fiscalement comme une rémunération, sur laquelle des cotisations sociales sont donc dues.
Théorie de la rémunération
La théorie de la rémunération naît de situations dans lesquelles une entreprise met gratuitement ou moyennant une rémunération limitée à la disposition de son dirigeant un bien (immobilier) à la disposition de son dirigeant. Dans ce cas, l’entreprise peut déduire les frais réels, alors que l’imposition du dirigeant est souvent valorisée à un avantage forfaitaire en nature moindre.
Cet écart entre la déductibilité de l’impôt sur les sociétés et l’imposition (plus limitée) de l’impôt sur le revenu des personnes physiques est un point d’attention du fisc, qui a déployé diverses voies d’attaque. Par exemple, la condition de finalité ou d’intentionnalité est examinée, contestant si les coûts ont été supportés par l’entreprise dans l’intention d’obtenir ou de conserver un revenu imposable.
Cependant, la théorie de la rémunération affirme que la performance réelle a bien été délivrée par le manager. La manière dont les services sont remboursés (en espèces ou en nature) ne devrait pas influencer l’appréciation de la déductibilité.
L’évolution de la jurisprudence sur ce sujet est encourageante. Cependant, un certain nombre de choses doivent être prises en compte. Il convient par exemple de prévoir une approbation formelle de la politique de rémunération par l’assemblée générale, suivie d’une mention explicite dans le procès-verbal. Par ailleurs, la relation entre la performance des dirigeants et l’évolution du chiffre d’affaires de l’entreprise doit être examinée. L’augmentation du chiffre d’affaires suggère que la performance du dirigeant génère effectivement un revenu imposable. Notons enfin que l’écart entre déductibilité et imposabilité ne constitue pas en soi une raison pour refuser la déduction, car il s’agit d’une simple conséquence de l’application stricte de la loi prévoyant les prestations forfaitaires en nature.
Statut fiscal représentant permanent d’un administrateur-personne morale
Pendant longtemps, l’incertitude a régné sur le statut fiscal d’une personne physique agissant en qualité de représentant permanent d’un administrateur personne morale. Pourtant, en 2020, la Cour de cassation a apporté des éclaircissements. La Cour a jugé que la fonction de représentant permanent est « similaire » à la fonction d’administrateur, et est donc considérée fiscalement comme un dirigeant de société.
Cet arrêt a un impact fiscal large, en conséquence de quoi le représentant permanent d’un administrateur personne morale est soumis, entre autres, à :
Requalification des revenus locatifs en rémunération des dirigeants
Reclassement des intérêts (déductibles) en dividendes (non déductibles) en cas d’intérêts excessifs ou lorsque le compte courant est supérieur à la somme des réserves taxées et du capital libéré
Le principe d’attraction (tout ce que le manager reçoit est considéré comme une rémunération du manager)
Avantages en nature imposables
Certaines obligations déclaratives de la part de la société gérée
Source : Vandelanotte