Un tribunal militaire birman a condamné 144 civils de l’État de Rakhine à des peines de prison pour leur soutien présumé à des groupes armés insurgés, ont rapporté lundi les médias locaux. Le verdict du tribunal militaire intervient plus de trois mois après l’arrestation des civils condamnés lors d’une attaque militaire contre leur village de Byain Phyu à Sittwe, la capitale de l’État de Rakhine.
Le tribunal a inculpé les civils condamnés en vertu d’une loi contre les associations illégales pour avoir prétendument soutenu l’Armée d’Arakan. Néanmoins, les familles des détenus ont nié toute implication des prisonniers dans une quelconque organisation armée insurgée et ont rejeté la condamnation du tribunal. Les villageois condamnés ont été arrêtés par la junte militaire au pouvoir dans le pays à la suite d’une attaque contre leur village le 29 mai en réponse à une attaque armée menée par des groupes rebelles. Selon les médias locaux, cette opération a entraîné la mort de près de 80 personnes après que la junte militaire a mené une « opération de nettoyage » affirmant avoir trouvé des cachettes de combattants de l’Armée d’Arakan dans les maisons des villageois.
A l’époque, les forces militaires avaient arrêté 300 villageois de Byain Phyu et en avaient traduit 150 devant un tribunal. Des citoyens anonymes ont déclaré aux médias locaux que quelques jours avant le procès de lundi, l’armée d’Arakan avait lancé une attaque à l’arme lourde contre le quartier général du commandement régional à Sittwe, ce qui aurait pu faire quelques victimes.
L’Armée d’Arakan est un groupe armé ethno-nationaliste basé dans l’État d’Arakan. Créée en 2009, elle a pour objectif de promouvoir l’identité nationale du peuple arakanais et de restaurer sa souveraineté. Elle combat la junte militaire du pays depuis que cette dernière a pris le pouvoir à la suite d’un coup d’État militaire. En février 2021, l’armée a pris le pouvoir en Birmanie à la suite d’un coup d’État qui a renversé le gouvernement élu. Cet événement a déclenché des manifestations généralisées et la mobilisation des forces de résistance armée en Birmanie. L’armée a sévèrement réprimé à la fois les manifestations pacifiques et la résistance armée. Le gouvernement d’unité nationale a été formé en avril 2009 en opposition au régime militaire et une résistance armée a émergé dans les mois suivants. L’Armée d’Arakan est considérée comme la plus grande force rebelle défiant l’armée au pouvoir.
Le conflit au Myanmar entre les forces militaires et les organisations armées a plongé le pays dans une crise humanitaire qui comprend le déplacement des communautés locales et la privation d’accès aux services essentiels tels que l’éducation et les soins de santé. Le conflit armé au Myanmar est également connu pour avoir provoqué la persécution de la communauté Rohingya. Ce groupe ethnique musulman a été victime de violations des droits de l’homme et a subi des abus, des massacres et des déplacements forcés malgré l’ordonnance de la Cour internationale de justice (CIJ) de fournir des mesures provisoires pour les protéger.
Les hostilités entre la junte militaire et l’armée d’Arakan se sont intensifiées depuis 2023, cette dernière ayant étendu son contrôle sur le territoire de l’État de Rakhine. En réponse, l’armée a mené des contrôles massifs et des attaques aveugles avec des hélicoptères de combat, de l’artillerie et des assauts terrestres, forçant les habitants de Byain Phyu à fuir le pays. Le village a été en grande partie déserté et des milliers de citoyens se sont réfugiés dans des écoles et d’autres bâtiments, l’armée déployant ses troupes pour empêcher quiconque de revenir.