Auteurs : Ilse De Geyter et Inne Royackers (Forum Advocaten)
Vous faites réaliser des travaux de sous-traitance et avant que les travaux ne soient terminés, votre sous-traitant fait faillite. Qu’est-ce que cela signifie pour votre projet et vos obligations contractuelles ? Les obligations contractuelles de vous et de votre sous-traitant seront-elles annulées à la suite de la faillite ? Pouvez-vous simplement remplacer votre sous-traitant ? La réponse à ces deux questions est non. Cet article donne un aperçu des mesures possibles que vous pouvez prendre si cette situation devait se produire et de la manière dont vous pouvez vous en protéger.
Principe : la force contraignante de l’accord
Si vous avez un contrat de construction avec votre sous-traitant, cela ne signifie pas que ce contrat et les obligations qui en découlent deviennent automatiquement caduques en cas de faillite. En principe, l’accord se poursuit comme d’habitude, compte tenu de la force contraignante de l’accord (articles 1134 de l’ancien code civil et 5.69 du nouveau code civil). Cela signifie que l’accord constitue la loi pour les parties qui l’ont conclu.
Par conséquent, vous ne pouvez pas simplement faire remplacer votre sous-traitant. Si vous procédez ainsi, vous risquez de devoir verser une indemnité à la masse du failli pour rupture de contrat.
Solution : remplacement possible avec l’accord du curateur
Or, il est clair que votre sous-traitant ne pourra plus réaliser les travaux, compte tenu de la faillite. Quelles mesures devez-vous prendre pour pouvoir changer correctement de fournisseur ou d’entrepreneur, sans vous rendre coupable de rupture de contrat ?
En cas de faillite, un curateur est nommé qui prend en charge la gestion et les opérations commerciales. Ce curateur est habilité à décider si le contrat sera ou non poursuivi par le failli. Vous trouverez les coordonnées du curateur désigné soit dans le Moniteur belge où la faillite a été publiée, soit en recherchant l’entreprise via la Banque-Carrefour des Entreprises (BCE).
Il y a de fortes chances que le conservateur accepte votre demande de ne pas poursuivre l’accord, car la poursuite entraîne souvent des objections pratiques. Si le curateur est d’accord, vous pouvez remplacer l’entrepreneur en faillite sans problème. Si le conservateur ne répond pas à votre demande, vous pouvez envoyer une lettre recommandée demandant si les travaux seront toujours exécutés. Dans cette lettre, vous accordez au curateur un délai (+/- 15 jours) dans lequel il doit répondre à votre question, le défaut de réponse dans les délais étant considéré comme une acceptation de la résiliation du contrat. Cela signifie que vous pouvez faire remplacer le sous-traitant après l’expiration de ce délai. Dans ce cas, veuillez confirmer cette décision par écrit afin d’éviter d’éventuelles discussions futures.
Même si le conservateur répond, il est crucial d’en conserver des preuves écrites pour éviter les discussions.
Mieux vaut prévenir que guérir
Conclure des accords contractuels sur les conséquences de la faillite
Pour éviter les risques d’obstacles juridiques et chronophages en cas de faillite, vous pouvez inscrire à l’avance une clause dans votre contrat. Celui-ci peut prévoir que le contrat prend fin automatiquement en cas de faillite du sous-traitant, sans qu’une autre mise en demeure ni l’accord du curateur ne soient requis. Cette précaution peut permettre d’économiser un temps et des coûts précieux.
Si votre sous-traitant n’est pas en faillite, mais est en procédure de redressement judiciaire, votre contrat de construction continuera à fonctionner normalement. Dans cette situation particulière, l’entreprise souhaite élaborer un plan de règlement de ses dettes basé sur une entente conclue avec ses créanciers. Une clause contractuelle prévoyant la résiliation de plein droit du contrat par une organisation judiciaire sera considérée comme invalide. L’entreprise poursuivra ses activités commerciales.
Vérifiez la situation financière de votre entrepreneur
De plus, il est conseillé d’enquêter minutieusement sur la situation financière de votre sous-traitant avant de conclure un contrat. L’existence de dettes fiscales ou sociales peut indiquer des difficultés financières. Vous pouvez obtenir ces informations via le site Internet www.checkinhoudingsplicht.be. Il s’agit d’un site Internet à l’initiative du SPF Finances et de l’Office National de la Sécurité Sociale (RSZ).
Paiement échelonné en fonction de l’avancement des travaux
Les chances que vous puissiez récupérer les sommes payées en trop auprès du failli sont plutôt limitées. En cas de faillite, il existe un classement des créanciers, les créanciers privilégiés étant prioritaires dans le paiement de leurs créances.
Il est donc important de veiller à ce que les sommes que vous versez à l’entrepreneur correspondent toujours, dans la mesure du possible, à la valeur actuelle des travaux réalisés. De cette façon, vous évitez d’avoir une (importante) créance en cas de faillite.
Par conséquent, lors de la conclusion d’un contrat, veillez à ce qu’un échéancier de paiement soit établi dans lequel l’entrepreneur est payé en plusieurs versements, en fonction de l’avancement des travaux spécifiques. Pour les paiements intermédiaires, vérifiez très attentivement que vous ne payez le montant de la facture que lorsque vous avez effectivement atteint cette phase des travaux. De cette façon, vous vous protégez contre une (importante) créance contre une entreprise en faillite et vous limitez vos propres dommages.
Source : Forum des avocats