Les 16 et 17 janvier, le Pakistan et l’Iran ont échangé des tirs de munitions guidées à travers leurs frontières respectives, prétendant tous deux viser des militants séparatistes baloutches.
L’incident a commencé par une frappe de missile iranien dans le district de Panjgur, dans la province pakistanaise du Baloutchistan. Téhéran a affirmé viser les militants du groupe « Jaish al-Adl ». En représailles, le Pakistan a exécuté ses propres frappes de précision dans la province iranienne du Baloutchistan-Sistan, affirmant qu’il visait les cachettes de l’Armée de libération du Baloutchistan (BLA) et du Front de libération du Baloutchistan (BLF).
L’Iran et le Pakistan ont souligné que leurs frappes respectives n’étaient pas dirigées contre l’État, le gouvernement ou les ressources militaires de leur voisin. Les deux pays ont plutôt souligné leur volonté mutuelle de faire face aux menaces séparatistes apparentes des Baloutches à travers leurs frontières.
Le 19 janvier, le Pakistan et l’Iran ont annoncé qu’ils allaient activement « désamorcer » les tensions. Dans un communiqué officiel, le ministère pakistanais des Affaires étrangères a déclaré que les deux pays renforceraient leur coopération en matière de lutte contre le terrorisme.
Une provocation surprise
Pour le Pakistan, les frappes transfrontalières iraniennes ont été une surprise. Jusqu’au 16 janvier, Islamabad pensait entretenir des relations cordiales avec Téhéran et, par conséquent, disposer de mécanismes de réponse pour gérer les questions séparatistes et militantes/terroristes des deux côtés de la région Baloutchistan-Sistan.
En fait, historiquement parlant, le Pakistan ne considérait généralement pas sa frontière avec l’Iran comme une vulnérabilité. Au contraire, Téhéran (bien que sous le Shah) a joué un rôle actif dans le renforcement de l’intégrité territoriale du Pakistan, en particulier au cours des premières années de ce pays, lorsque son appareil de sécurité était bien plus faible et moins développé. Les liens n’ont pas été aussi forts depuis la Révolution, mais ils ne se sont jamais détériorés au point où le Pakistan a dû envisager de défendre son front sud-ouest avec des capacités militaires conventionnelles à part entière, telles que des déploiements permanents de blindés et d’artillerie, par exemple.
Ainsi, les frappes iraniennes auraient pu aggraver la situation pour le Pakistan, non seulement en termes de réponse à court terme, mais, potentiellement, également en termes de traitement à long terme de l’Iran.
Pression domestique
Il est intéressant de noter que les dirigeants iraniens et pakistanais étaient confrontés à des pressions intérieures.
Pour Téhéran, ses frappes contre des groupes militants présumés au Pakistan – ainsi qu’en Irak et en Syrie – étaient un signal adressé à la population iranienne. Fondamentalement, Téhéran voulait montrer qu’il pouvait exercer une forte influence et une forte portée régionale, notamment lorsqu’il s’agissait de défendre ses intérêts en matière de sécurité.
En effet, avant ces frappes, l’Iran avait subi de nombreuses attaques, telles que l’assassinat de Sayed Razi Mousavi, un commandant du Corps des Gardiens de la révolution islamique (CGRI), ou l’attaque terroriste contre un mémorial du chef du CGRI, Qassem Soleimani, qui a tué plus de 90 civils à Kerman. Ainsi, Téhéran a ressenti le besoin de montrer à sa population et aux puissances extérieures qu’il peut exercer sa force en dehors de ses frontières et, si cela lui est demandé, riposter avec une combinaison de capacités (par exemple, des mandataires, des missiles, des drones, etc.).
En fait, Téhéran n’avait probablement pas l’intention de cibler le Pakistan pour l’affaiblir ; au contraire, le Pakistan était pris dans un récit plus large que Téhéran tentait de construire pour élever sa stature.
Cependant, les frappes de Téhéran ont mis en lumière les dirigeants de la sécurité pakistanaise, qui – ironiquement – célébraient le même jour l’introduction de matériels qui, selon eux, permettraient de se défendre contre de telles frappes indiennes, comme des systèmes de missiles balistiques contre-tactiques (TBM), par exemple.
Aujourd’hui, tout comme lors de l’épisode Balakot contre l’Inde en 2019, l’opinion publique s’attendait généralement à ce que l’armée pakistanaise réponde aux provocations apparentes de l’Iran. De plus, le Pakistan s’est senti obligé de réagir, car permettre à l’Iran de frapper en toute impunité pourrait enhardir l’Inde. Cependant, l’establishment de la sécurité pakistanais était également confronté à des pressions contre sa participation active à l’évolution politique du pays, en particulier depuis l’effondrement du gouvernement en 2022.
Ainsi, le lendemain, l’armée pakistanaise et la force aérienne pakistanaise (PAF) ont entrepris « l’opération Marg Bar Sarmachar ». Le Pakistan a déclaré avoir mené une opération « fondée sur le renseignement » utilisant des drones, des armes à distance et des roquettes d’artillerie guidées dans la province iranienne du Baloutchistan-Sistan.
Il est intéressant de noter que l’Iran et le Pakistan ont tous deux obtenu ce dont ils avaient besoin de cet épisode par ailleurs anormal : une opportunité de démontrer leur influence régionale. L’Iran a montré qu’il pouvait exercer une influence sur plusieurs fronts, et le Pakistan est devenu l’un des deux seuls pays à lancer des frappes sur le territoire iranien depuis la guerre Iran-Irak des années 1980. Alors, comment Islamabad et Téhéran vont-ils procéder à partir de là ?
De-Escalation
Aucune des deux parties ne peut se permettre une attitude d’escalade, surtout à long terme. Si le Pakistan commençait à considérer l’Iran comme une menace pour son intégrité territoriale, il lui faudrait déployer une présence militaire conventionnelle importante et, potentiellement, une présence stratégique de représailles sur son front sud-ouest. Cependant, cette décision obligerait sans aucun doute le Pakistan à diviser son attention et ses ressources entre l’Inde et l’Iran, affaiblissant ainsi sa capacité à maintenir une position conventionnelle crédible contre l’Inde…
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