Auteurs : Pedro Gielen et Hanna Plas (GD&A Advocaten)
De nombreux pouvoirs adjudicateurs sont parfois confrontés à une demande de leur entrepreneur de prolonger le délai d’exécution sur la base de l’article 36 de l’AUR en raison de l’approbation tardive des dessins détaillés et d’exécution. Dans cette newsletter, nous expliquons brièvement l’application de cet article, après quoi nous attirons l’attention sur la prolongation du délai de mise en œuvre en raison d’une approbation tardive et sur les raisons pour lesquelles cela ne va pas toujours de soi.
La préparation des dessins de détail et d’exécution auxquels l’entrepreneur est tenu et l’obligation d’approbation correspondante du pouvoir adjudicateur sont importantes pour l’exécution correcte et ponctuelle d’un marché public. L’article 36 AUR s’applique en principe aux commandes de travaux, de fournitures et de prestations. En pratique, ce sont principalement les entrepreneurs en mission pour des travaux (de construction) et les concepteurs ou architectes dans le cadre de leur mission de service qui s’appuient sur cet article.
Champ d’application
Quiconque lit l’article 36 AUR comprendra que cet article prévoit des obligations tant pour le contractant que pour le pouvoir adjudicateur. Par exemple, il impose à l’entrepreneur l’obligation de préparer, à ses frais, tous les dessins détaillés et d’exécution dont il a besoin pour mener à bien l’exécution de la mission. Par la suite, il est du devoir du pouvoir adjudicateur d’approuver ou non les dessins détaillés et d’exécution spécifiés dans les documents contractuels – en temps opportun.
L’article précise :
L’entrepreneur établira, à ses frais, tous les dessins détaillés et d’exécution dont il a besoin pour mener à bien l’exécution de la mission.
Les documents contractuels déterminent en outre quels dessins sont approuvés par le pouvoir adjudicateur. Celui-ci dispose d’un délai de trente jours à compter de la date de remise des dessins pour les approuver ou les refuser.
Les éventuels dessins améliorés sont à nouveau soumis au pouvoir adjudicateur, qui dispose d’un délai de quinze jours pour les approuver, dans la mesure où les améliorations demandées ne résultent pas de nouvelles exigences du pouvoir adjudicateur.
Tout dépassement des délais mentionnés aux deuxième et troisième alinéas donne lieu à une prolongation proportionnelle du délai d’exécution, à moins que le pouvoir adjudicateur apporte la preuve que le retard effectivement causé au détriment du contractant est d’une durée inférieure au dépassement du délai. .
Les documents contractuels indiquent le nombre d’exemplaires des dessins que l’entrepreneur doit fournir au pouvoir adjudicateur.
Le pouvoir adjudicateur ne pourra pas reproduire ces dessins. Ils ne peuvent être utilisés que pour la mission et à aucune autre fin.
Les décisions ci-dessus s’appliquent également aux autres documents et objets que le contractant établit ou produit pour mener à bien la mission.
Il n’existe pas de définition légale du terme « dessins de détail et d’exécution ».
Pour savoir quels documents constituent un dessin au sens de l’article 36 AUR, nous considérons le contenu de la mission d’un concepteur, d’un architecte ou d’un entrepreneur. Dans les contrats gouvernementaux pour les projets de construction, les concepteurs créent des dessins détaillés pour clarifier et compléter les documents contractuels, tandis que les exécuteurs créent des dessins d’exécution pour démontrer comment ils réaliseront les travaux.[1]
Par ailleurs, le régulateur ajoute au dernier alinéa de l’article 36 AUR que cet article s’applique également aux autres documents et objets que le contractant établit ou produit pour mener à bien la mission. Une fois encore, nous manquons de définition de ce que cela pourrait impliquer exactement.
Compte tenu de l’incertitude quant à la portée exacte de l’article 36 AUR, il est très important de prêter attention à une description précise et claire des dessins et autres documents ou objets qui doivent être approuvés par le pouvoir adjudicateur lors de l’élaboration des documents contractuels.
Le régulateur permet également au pouvoir adjudicateur de déroger à l’article 36 AUR dans les documents contractuels.[2] Cela permet de prévoir dans les documents de mission un délai plus ou moins long pendant lequel le client doit évaluer les documents soumis. Il est également possible, par exemple, de déroger à la sanction en cas d’approbation tardive. Une dérogation doit bien entendu être incluse dans les conditions de l’article 9 AUR et est toujours indiquée au début du cahier des charges.
Portée de l’article 36 AUR
À compter de la date à laquelle les dessins ou autres documents sont soumis au pouvoir adjudicateur pour approbation, celui-ci dispose de trente (30) jours calendaires pour s’y conformer. En cas de refus du pouvoir adjudicateur, l’entrepreneur apportera les améliorations nécessaires, après quoi il soumettra à nouveau les dessins/documents au pouvoir adjudicateur. Le pouvoir adjudicateur dispose alors de quinze (15) jours calendaires pour approuver le dessin ou le document amélioré.
L’exception ici est que le deuxième délai ne s’applique pas si le pouvoir adjudicateur a formulé des commentaires lors de la première inspection qui peuvent être considérés comme une nouvelle exigence.[3] Cela soulève la question de savoir comment gérer cela. Il n’est pas raisonnable d’affirmer que le pouvoir adjudicateur perd son droit d’approuver le dessin ou le document modifié et que l’entrepreneur devrait automatiquement supporter les conséquences de la nouvelle exigence. La seule solution semble être que dans un tel cas, le contractant demande une prolongation du délai de mise en œuvre sur la base de l’article 38/11 AUR pour le retard causé par la nouvelle exigence.[4]
Conséquences d’une approbation / refus tardif
Il est important que le pouvoir adjudicateur respecte le délai légal d’approbation.
En effet, le pouvoir adjudicateur qui dépasse les délais d’approbation peut s’attendre à une prolongation proportionnelle du délai de mise en œuvre. Le contractant a notamment droit à une prolongation du délai d’exécution d’autant de jours calendaires que le nombre de jours calendaires de dépassement du délai d’approbation.[5] Une conséquence que la plupart des pouvoirs adjudicateurs souhaiteraient peut-être éviter.
Néanmoins, chaque approbation tardive n’entraîne pas automatiquement une prolongation du délai.
Tout d’abord, le contractant doit démontrer qu’un dessin, un autre document ou un objet n’a pas été approuvé à temps par le pouvoir adjudicateur et exactement de combien de jours de retard cela s’agit.[6]
Une remarque supplémentaire pour le contractant qui souhaite invoquer l’article 36 AUR est qu’il doit soumettre sa demande de prolongation de délai au pouvoir adjudicateur avant l’expiration du délai d’exécution contractuel. Avec cette demande, le contractant indique exactement quels documents ont été approuvés en retard et joint une justification calculée du nombre de jours pour lesquels il souhaite une prolongation.[7]
En outre, le pouvoir adjudicateur n’est pas tenu d’accepter simplement toute demande de prolongation de délai sur la base de l’article 36 de l’AUR.[8]
Par exemple, le pouvoir adjudicateur qui reçoit une telle demande doit d’abord vérifier si les documents approuvés tardivement étaient soumis à l’approbation préalable du pouvoir adjudicateur.
En outre, le pouvoir adjudicateur peut également apporter la preuve contraire qu’un document approuvé tardivement ne concernait pas la tâche qui aurait pu causer le retard dans l’exécution. Supposons, par exemple, qu’un dessin détaillé soumis pour approbation trop tôt, alors que l’exécution de ce dessin n’était pas prévue avant quatre mois, soit approuvé cinq jours trop tard. Dans ce cas, l’approbation tardive n’a pas entraîné de véritable retard dans la mise en œuvre.
Une autre preuve du contraire peut être que le pouvoir adjudicateur démontre que le retard n’est pas dû à une approbation tardive, mais que cela est dû à d’autres causes, voire à un manquement de la part du contractant lui-même.
Enfin, le pouvoir adjudicateur peut apporter la preuve contraire que le retard effectif du contractant est inférieur au dépassement du délai d’approbation. Dans ce cas, le délai d’exécution ne doit être prolongé que du retard réel dans la planification du contractant.
Décision
Des documents de mission rédigés avec précision sont d’une grande importance. Dans les documents de commande, le pouvoir adjudicateur peut, par exemple, indiquer exactement quels dessins détaillés et d’exécution le client doit préparer, quels documents sont soumis à approbation et comment cette approbation doit être effectuée. Par ailleurs, le pouvoir adjudicateur peut décider de déroger aux dispositions de l’article 36 AUR lors de l’élaboration du cahier des charges.
En outre, le pouvoir adjudicateur doit être conscient que tout dépassement des délais dans lesquels les dessins détaillés et de conception doivent être inspectés n’entraîne pas automatiquement une prolongation proportionnelle du délai d’exécution. Il reste encore quelques formalités à remplir pour le contractant ainsi que d’éventuels contre-arguments pour le pouvoir adjudicateur.
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[1] S. MORAS et K. UYTTERHOEVEN, « La prolongation du délai d’exécution d’un marché public en raison de l’approbation tardive de dessins, autres documents ou objets par le pouvoir adjudicateur (art. 36 KB AUR 2017) : pas seulement un quasi-automatisme… », TBO 2022/3, (133) 134.
[2] Art. 9 AUR.
[3] Art. 36, troisième couvercle AUR.
[4] A. EECKHOUT et L. OTTEVAERE, « Dessins de détail et d’exécution concernant la conception et la réalisation, où est la limite ? » dans C. DE KONINCK, P. FLAMEY, P. THIEL et E. HACKE (éd.), Annuaire des marchés publics 2020-2021, Bruxelles, PEB, 2021, 657 ; S. MORAS et K. UYTTERHOEVEN, « La prolongation du délai d’exécution d’un marché public en raison de l’approbation tardive de dessins, autres documents ou objets par le pouvoir adjudicateur (art. 36 KB AUR 2017) : pas seulement un quasi-automatisme… », TBO 2022/3, (133) 136.
[5] Art. 36, quatrième couvercle AUR.
[6] Art. 8.4 PC
[7] Art. 36 AUR conjointement à l’art. 38/16 AUR.
[8] S. MORAS et K. UYTTERHOEVEN, « La prolongation du délai d’exécution d’un marché public en raison de l’approbation tardive de dessins, autres documents ou objets par le pouvoir adjudicateur (art. 36 KB AUR 2017) : pas seulement un quasi-automatisme… », TBO 2022/3, (133) 137-138.
Source : GD&A Advocaten