La Royal Thai Air Force (RTAF) veut atteindre les étoiles – littéralement – avec l’intention de se rebaptiser Royal Thai Air and Space Force. Parallèlement à ce changement de nom, un Centre national de coordination des intérêts aériens et spatiaux sera créé afin de superviser les activités de défense aérospatiale internes et externes de la Thaïlande.
L’annonce a été faite la semaine dernière par le porte-parole de la RTAF, le maréchal de l’Air Prapas Sornchaidee, à la suite de la première réunion des commandants de la défense de l’exercice 2025. Avant que l’une de ces propositions puisse officiellement prendre son envol, des modifications législatives seront nécessaires. Si tout se passe comme prévu, le processus devrait être finalisé d’ici 2028.
Le programme spatial de la Thaïlande s’est traditionnellement limité à la recherche et aux applications socio-économiques. Dans ces domaines, et en termes relatifs en Asie du Sud-Est, la Thaïlande fait partie des pays les plus avancés et les plus actifs. Grâce à son Agence de développement de la géoinformatique et des technologies spatiales (GISTDA), fondée en tant qu’organisation publique en 2000, la Thaïlande est devenue un pionnier en matière de technologie d’observation de la Terre. Les satellites THEOS-1 et THEOS-2, lancés respectivement en 2008 et 2023, ont énormément contribué à la surveillance agricole et environnementale du pays, à l’urbanisme et à la gestion des catastrophes. La prochaine génération de THEOS, dont le lancement est prévu d’ici 2027, est en grande partie, sinon entièrement, développée et assemblée au niveau national, démontrant les progrès de la Thaïlande en matière d’expertise technique et d’infrastructure.
Le centre d’intégration et de test d’assemblage du GISTDA, situé dans le corridor économique oriental de la Thaïlande, où se trouve la fabrication de THEOS-3, est devenu une installation importante à la fois pour les start-ups spatiales privées et pour le RTAF. C’est ici que Thai Universe-1, qui serait le premier nanosatellite fabriqué par la RTAF à partir de composants abordables de qualité commerciale au lieu de composants coûteux de qualité spatiale, est en cours de test.
L’incursion de la RTAF dans l’espace a franchi sa première étape majeure lorsque Napa-1, sous contrat avec la société néerlandaise ISISPACE, est entré en orbite en 2020. Le Napa-2, peu modifié, a rapidement suivi en 2021.
Le livre blanc de 80 pages du RTAF, publié plus tôt cette année en tant que mise à jour de l’édition 2020, consacre une attention particulière à l’importance croissante de l’espace. Cela met en évidence la vulnérabilité précaire qui accompagne la dépendance aux moyens spatiaux alors que les grandes puissances s’affrontent. Dans le même temps, il souligne la nécessité pour les petites puissances d’exploiter la technologie spatiale pour améliorer le renseignement militaire. Ceci est crucial pour les opérations efficaces à long terme de la RTAF dans trois zones désignées : la zone d’intérêt mondiale (où se trouvent les citoyens thaïlandais), la zone d’influence (Asie du Sud-Est) et la zone de responsabilité (territoire souverain de la Thaïlande). La zone de responsabilité de la RTAF, qui comprend la région d’information de vol et la zone économique exclusive de la Thaïlande, s’étend sur 1 979 722 kilomètres carrés.
Loin d’être un changement brusque et vide de sens comme certains pourraient le percevoir, les derniers efforts de la RTAF reflètent la consolidation progressive de l’intérêt militaire spatial de la Thaïlande, qui est de nature modeste et défensive. Ce contexte explique pourquoi la Force Spatiale ne se constitue pas comme une branche armée indépendante, mais restera rattachée à l’Armée de l’Air.
Le Centre national de coordination des intérêts aériens et spatiaux proposé s’inspire clairement du Thai Maritime Enforcement Command Center (Thai-MECC), l’organisme centralisé thaïlandais pour la gouvernance de la sécurité maritime. Comme je l’ai écrit dans un article publié par l’Initiative pour la transparence maritime du CSIS en Asie, le Thai-MECC s’est révélé très efficace dans la lutte contre les menaces contre les intérêts maritimes de la Thaïlande, car il est légalement habilité à mener des surveillances et des enquêtes, et à mobiliser les ressources de la Marine royale thaïlandaise. (RTN) et six autres agences gouvernementales. La main-d’œuvre ne pose pas vraiment de problème dans le sens où le personnel de Thai-MECC est issu de différentes agences, ce qui évite les coûts supplémentaires liés aux nouvelles embauches.
Un point d’observation intéressant sera la dynamique civilo-militaire du nouvel effort de coordination. Le Thai-MECC est dominé par le RTN, que ce soit sur le papier ou dans la pratique, laissant les agences civiles quelque peu en retrait. Cet arrangement n’a pas vraiment soulevé de questions car, même si la portée de la sécurité maritime s’est considérablement élargie, la vision traditionnellement centrée sur l’armée de la défense territoriale reste intacte. En revanche, le domaine spatial a toujours été plus étroitement lié à la science. En tant que tel, il est logique de penser que la RTAF, bien que centrale, n’exerce pas le même niveau de domination dans le futur Centre de coordination des intérêts aériens et spatiaux que le RTN avec le Thai-MECC.
La RTAF se présente comme la branche la moins conservatrice de l’armée thaïlandaise, comme en témoigne sa relative ouverture aux commandants possédant des qualifications internationales et la publication avant-gardiste d’un livre blanc complet. La RTN et l’armée ont montré une nette préférence pour les commandants formés dans le pays, et ce n’est qu’au cours des deux dernières années qu’elles ont commencé à publier leurs livres blancs. Les initiatives de restructuration actuellement en cours sont une nouvelle démonstration de l’engagement de la RTAF à rester à l’avant-garde de la modernisation militaire de la Thaïlande.