Le jeu vidéo des années 1980 prouve qu’il fait une différence notable avec les souvenirs intrusifs.
Une étude récente menée par des chercheurs de l’Université d’Uppsala a révélé des résultats prometteurs pour une intervention simple mais efficace visant à soulager les symptômes du syndrome de stress post-traumatique (SSPT). L’étude, publiée dans BMC Medicine, se concentre sur l’utilisation de jeux vidéo, en particulier du célèbre jeu Tetris, qui existe depuis des décennies, pour aider à réduire les souvenirs intrusifs, un symptôme essentiel et parfois invalidant de la maladie.
Le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) est souvent caractérisé par des souvenirs ou des flashbacks intrusifs et pénibles, où les personnes se souviennent avec vivacité d’événements traumatiques comme si elles les revivaient. Ces flashbacks peuvent être débilitants, affectant la santé mentale globale d’une personne, son sommeil, sa concentration et sa capacité à s’engager dans des activités quotidiennes. Traditionnellement, les traitements du SSPT impliquent des séances de thérapie, notamment une thérapie cognitivo-comportementale (TCC) ou une thérapie d’exposition, nécessitant souvent plusieurs rendez-vous avec un clinicien qualifié. Cependant, cette nouvelle recherche présente une intervention plus simple et beaucoup moins coûteuse à laquelle les personnes peuvent facilement accéder à domicile.
L’étude a porté sur des professionnels de santé qui avaient été exposés à un stress traumatique alors qu’ils travaillaient en première ligne pendant la pandémie de COVID. Les chercheurs se sont particulièrement intéressés à la manière dont une seule séance de traitement guidé, comprenant le jeu Tetris, pouvait réduire considérablement la fréquence et la gravité des flashbacks.
Emily Holmes, professeure à l’université d’Uppsala et responsable de l’étude, s’est montrée optimiste quant aux résultats : « Il est possible de réduire la fréquence des souvenirs désagréables et intrusifs liés à un traumatisme, et ainsi d’atténuer d’autres symptômes du syndrome de stress post-traumatique. Avec une seule séance de traitement guidée, nous avons constaté des effets positifs qui ont persisté cinq semaines et même six mois après le traitement. »
Le traitement basé sur Tetris s’appuie sur un concept connu sous le nom de « rotation mentale », une tâche cognitive essentielle au gameplay de Tetris. Dans le jeu, les joueurs doivent faire pivoter et manipuler mentalement des blocs de différentes formes pour les insérer dans une grille. L’engagement visuel et la tâche mentale de manipulation de ces formes nécessitent des ressources cognitives importantes, ce qui, selon Holmes et ses collègues, « peut perturber la capacité du cerveau à rejouer des souvenirs intrusifs. Cette distraction empêche les flashbacks liés au traumatisme de s’enraciner profondément. »
Pour tester leur théorie, les chercheurs ont recruté 164 participants. Il s’agissait tous de professionnels de la santé qui avaient été exposés à des expériences traumatisantes pendant la pandémie. Les participants ont été divisés en deux groupes. Les deux groupes ont été invités à surveiller leurs souvenirs intrusifs pendant une semaine, en notant la fréquence des flashbacks. Par la suite, un groupe a été invité à se livrer à une tâche visuelle (jouer à Tetris) tandis que le groupe témoin a participé à une tâche non visuelle, comme écouter la radio.
Les résultats ont été frappants. Au début de l’étude, les participants avaient en moyenne 15 flashbacks par semaine. Cinq semaines après l’intervention, ceux du groupe témoin, qui n’avaient pas participé à la tâche visuelle, avaient encore environ cinq flashbacks par semaine. En revanche, le groupe qui jouait au jeu Tetris a rapporté une moyenne d’un seul flashback par semaine. Plus surprenant encore, les bienfaits du traitement ont persisté pendant des mois. Six mois plus tard, le groupe qui jouait à Tetris continuait à montrer une réduction significative de la gravité globale des symptômes du TSPT. En revanche, le groupe témoin a constaté une amélioration moindre.
L’efficacité de l’intervention Tetris a été mesurée à l’aide de la liste de contrôle du TSPT pour le DSM-5 (PCL-5), un outil largement reconnu pour évaluer les symptômes du TSPT. Le groupe Tetris a montré près de la moitié des symptômes du TSPT par rapport au groupe témoin. Ce résultat souligne le potentiel d’une intervention aussi brève comme outil précieux pour un traitement précoce.
L’étude a également introduit le concept de « vaccin cognitif », un outil qui pourrait être utilisé après un traumatisme pour prévenir l’apparition de symptômes plus graves du syndrome de stress post-traumatique. Tout comme les vaccins sont utilisés pour prévenir les maladies physiques, Holmes envisage un avenir où des outils de santé mentale, comme l’intervention basée sur Tetris, pourraient être administrés après des événements traumatiques pour prévenir le développement du syndrome de stress post-traumatique.
Cette approche simple et innovante offre un nouvel espoir aux personnes aux prises avec le syndrome de stress post-traumatique, suggérant que même des interventions brèves et ciblées peuvent apporter des améliorations significatives et durables.
Sources:
Une intervention guidée en séance unique pour réduire les souvenirs intrusifs de traumatismes liés au travail : un essai contrôlé randomisé auprès de professionnels de la santé pendant la pandémie de COVID-19
Une étude montre que les jeux vidéo peuvent atténuer les flashbacks du syndrome de stress post-traumatique