Auteur : Marc Vandecasteele (LegalNews)
En ce qui concerne l’indemnisation en cas d’expulsion, la loi sur les baux commerciaux prévoit ce qui suit à l’article 25 :
« Si le locataire a régulièrement exprimé son souhait d’exercer son droit de renouvellement et que celui-ci lui a été refusé, il a droit à une indemnisation dans les cas précisés ci-dessous qui, sauf accord des parties, seront conclus après le début du contrat. ce droit, forfaitairement, est déterminé comme suit :
1° L’indemnité est égale à un an de loyer, si le bailleur exige que le bien soit affecté à un usage autre que commercial, en application de l’article 16, 2°, ou qu’il soit reconstruit, conformément à l’article 16, 3°. Toutefois, dans ce dernier cas, aucune indemnité n’est due si le bien doit être démoli ou reconstruit en raison de son vétusté, d’un cas de force majeure ou en vertu de dispositions législatives ou réglementaires ;
2° L’indemnité est égale à deux années de loyer, si le propriétaire ou l’un des usagers mentionnés à l’article 16, § I, 1°, même en cas d’application de l’article 16, § III, exerce un commerce similaire dans le immobilier Bon;
3° L’indemnité s’élève à trois années de loyer, éventuellement augmentées d’un montant suffisant pour réparer intégralement le préjudice causé, si le bailleur, sans justifier d’un motif impérieux, ne se conforme pas à l’intention sur la base de laquelle il aurait pu expulser le locataire du bien non mis en œuvre dans un délai de six mois et depuis au moins deux ans. Toutefois, cette indemnité n’est pas due si le bailleur donne au bien une destination qui lui aurait permis de le reprendre sans indemnité ou moyennant une indemnité égale ou inférieure à l’indemnité qu’il a dû supporter ;
4° L’indemnité est égale à un an du loyer déterminé au nouveau contrat de bail, lorsque le locataire ayant fait une offre sérieuse a été rejeté à la suite de l’offre d’un tiers complémentaire enchérisseur, conformément à l’article 23, et ledit tiers dans la propriété exerce un commerce différent de celui de l’ancien locataire ;
5° L’indemnité est égale à deux ans du loyer déterminé au nouveau contrat de bail, si le nouveau locataire exerce dans le bien un commerce similaire à celui du locataire sortant ;
6° L’indemnité d’expulsion s’élève à trois ans de loyer, éventuellement augmenté d’un montant suffisant pour réparer intégralement le préjudice causé, si le propriétaire ou le nouveau locataire entreprend un commerce similaire avant l’expiration d’un délai de deux ans, sans qu’il en a informé le locataire sortant au moment de son expulsion. Le propriétaire et le troisième, nouveau locataire, sont solidairement responsables de cette indemnisation.
Le montant du loyer perçu au titre de la sous-location peut être déduit par le tribunal en tout ou partie du loyer servant de base à l’indemnité déterminée au présent article et à l’article 16, IV.
En cas de sous-location commerciale, le juge peut répartir l’indemnité entre le locataire principal et le sous-locataire.
Dans les cas visés aux 2° (…) et 5° ci-dessus, le locataire peut saisir le tribunal si l’indemnisation est manifestement insuffisante en raison du bénéfice que le propriétaire a tiré de l’expulsion.
De son côté, le bailleur peut s’adresser aux tribunaux si l’indemnisation est manifestement excessive, compte tenu de l’état d’abandon ou de vétusté du fonds de commerce au moment de la reprise.
Si le bailleur est propriétaire du fonds de commerce exploité dans le bien loué et que le loyer concerne à la fois le bien loué et le fonds de commerce, il n’est redevable d’une indemnité que si le locataire prouve qu’il a réduit l’importance du fonds de commerce d’au moins 15 ème augmenté. Dans ce cas, le juge détermine l’indemnisation équitablement, en fonction de la plus-value survenue pour le bailleur.
Cette affaire concernait une application de l’art. 25, alinéa 1, 3° Loi sur les baux commerciaux : dans ce cas, le droit à indemnisation n’existe qu’après l’expiration du délai d’exécution légalement déterminé, c’est-à-dire dans les six mois suivant l’expulsion et pendant une période de 2 ans.
Cela signifie que ce n’est qu’après qu’un accord valable peut être conclu concernant la responsabilité et le montant de l’indemnisation, ce qui a de nombreuses conséquences si un accord est conclu avant cette date.
Par exemple, la Cour de cassation annule le jugement du tribunal de première instance de Bruxelles (degré d’appel) :
‘ Le jugement attaqué constate que la demanderesse et la défenderesse ont conclu un contrat de bail commercial, que, par lettre « du 13 juillet 2016, [la demanderesse] a adressé une demande de renouvellement du bail », que, « le 29 septembre 2016, [la défenderesse] a refusé celle-ci, conformément à l’article 16 de la loi sur les baux commerciaux », son intention étant « de reconstruire la partie d’immeuble dans laquelle [la demanderesse] exerçait son activité », que, « sur la base d’un accord verbal, [la demanderesse] est restée dans les lieux », que, « le 2 juillet 2018, les parties ont négocié et signé une transaction », que, « ce même 2 juillet 2018, [la demanderesse a restitué] les clés », que, « dès la fin de l’occupation précaire, [une société tierce] a procédé à l’évacuation d’un grand nombre d’objets » et a facturé ces travaux le 31 août 2018, et que la défenderesse « fait état de ce que, le 5 octobre 2020, [des tiers] ont acquis le bien [précédemment loué] ».
Il considère que « les travaux de déblai font partie des travaux annoncés, en sorte que [la défenderesse] a respecté le […] délai […] de six mois suivant la fin de l’occupation pour commencer les travaux », prévu par l’article 25, alinéa 1er, 3°, précité.
Il déduit de ces énonciations que la transaction précitée est « valable au sens de l’article 25, alinéa 1er, de la loi sur les baux commerciaux » et que, « dans ces conditions, [la demanderesse] n’est pas fondée à se prévaloir du non-respect par [la défenderesse] de son obligation de faire réaliser elle-même les travaux de démolition et de reconstruction ».
Le jugement attaqué, qui, par ces énonciations, retient que, le preneur ayant cessé d’occuper le bien loué, l’éviction a effectivement eu lieu le 2 juillet 2018 et que les parties ont conclu valablement le même jour une convention réglant le droit de la demanderesse à l’indemnité d’éviction prévue par l’article 25, alinéa 1er, 3°, de la loi sur les baux commerciaux, viole cette disposition.
Le moyen est fondé.’
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