Auteur : Bas Schuermans (Bricks Advocaten)
Introduction
L’invention (et la commercialisation) d’Internet dans les années 1990 a sans aucun doute été l’un des événements les plus marquants et les plus marquants de notre époque. Au 21e siècle, Internet est progressivement devenu omniprésent, et l’accès à celui-ci s’est sensiblement accru, d’autant plus que les décideurs politiques ont également reconnu son importance. Son immense pouvoir ne peut être sous-estimé : l’accès à la plus grande bibliothèque d’informations existante se fait en quelques clics de souris. Mais en pratique, cet accès est assuré par des moteurs de recherche – des programmes informatiques permettant de rechercher des informations dans un ensemble de données – dont le plus connu et le plus utilisé est celui de la société américaine Google du même nom.
En plus de la fonction de recherche générale, Google vous permet également de passer en revue des événements, des personnes et des entités et ainsi de donner un avis/évaluer. Les avis Google sont commercialement précieux pour les entreprises, car ils permettent aux clients (potentiels) de voir immédiatement l’efficacité d’un produit ou la qualité d’un service. Bien entendu, cette pièce (comme toujours) présente également un inconvénient, car une entreprise peut également être confrontée à une mauvaise évaluation, ce qui peut avoir un impact économique néfaste.
Que peut faire une entreprise si elle constate que quelqu’un a laissé un avis négatif en ligne, par exemple via un avis Google, et estime que cela entraînera une baisse de son chiffre d’affaires ? L’examinateur peut-il être poursuivi en justice pour paiement de dommages-intérêts pour avoir terni sa réputation ? Ou bien le critique exerce-t-il simplement son droit à la liberté d’expression ? Elle a déjà été débattue devant les cours et tribunaux belges, mais que peut-on en conclure ? Ce blog fournit quelques explications.
Droit à la liberté d’expression vs. droit à une bonne réputation
La liberté d’expression est garantie à la fois par la Constitution (article 19 de la Constitution) et par les droits de l’homme (article 10 de la CEDH), c’est pourquoi elle est considérée comme un droit essentiel/fondamental dans une société démocratique. Il peut être défini comme le droit d’exprimer des convictions philosophiques, religieuses, politiques, personnelles ou idéologiques par des paroles, des écrits ou des comportements (R. SENELLE, Commentaire sur la Constitution belge, Bruxelles, Ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de la collaboration au Développement, 1974). , 37).
Toutefois, le droit à la liberté d’expression n’est pas absolu. L’article 10, paragraphe 2, de la CEDH dispose que la liberté d’expression peut être soumise à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions, au moins dans la mesure où elles sont prévues par la loi et sont nécessaires dans une société démocratique. Cet article stipule, par exemple, que la liberté d’expression peut être limitée pour protéger la bonne réputation. Cela a également été confirmé par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Růžový Panter c. République tchèque (CrEDH 2 février 2012, n° 20240/08, Růžový Panter c. République tchèque).
Il est clair que le droit à la liberté d’expression peut être limité pour protéger la bonne réputation. La question est cependant de savoir si la personne qui publie un avis négatif sur Google exerce dans ce cas son droit à la liberté d’expression ou s’il peut y avoir une violation de sa réputation. En outre, la question se pose de savoir si, en tant que personne ayant fait l’objet d’un avis négatif, on peut également réclamer des dommages et intérêts à l’auteur de l’avis dans ce cas, à la lumière des principes de responsabilité extracontractuelle de l’article 1382 du Code civil ? Conformément à l’article 10, paragraphe 2, de la CEDH, le droit à la liberté d’expression peut être limité en cas d’erreur au sens de l’article 1382 du code civil.
L’exercice du droit à la liberté d’expression peut en effet être considéré comme un acte illicite pouvant causer un préjudice à des tiers et donnant donc lieu à une indemnisation (par exemple en cas d’atteinte à la réputation). Mais comment cela est-il évalué par un juge ?
Évaluation par un tribunal
Lorsqu’un tribunal doit statuer sur une demande en dommages et intérêts (sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, notamment en matière de responsabilité extracontractuelle), le tribunal doit déterminer la présence de trois éléments : une faute de l’examinateur, le préjudice causé à l’examinateur et la relation causale entre les deux. Il appartient au demandeur, dans notre exemple un réviseur, d’apporter la preuve de ces éléments.
Comment un juge va-t-il évaluer si une personne ayant rédigé un avis négatif Google sur une entreprise a commis une erreur extracontractuelle au sens de l’article 1382 du Code civil ? Le juge devra apprécier les actes du réviseur au regard du critère d’une personne normalement prudente et raisonnable placée dans les mêmes circonstances (ancien critère du « bon père de famille » ou du « bonus paterfamilias »). En utilisant ce critère et en l’appliquant aux circonstances factuelles concrètes, le juge, lors de l’appréciation d’une erreur, mettra en balance les intérêts entre le droit à la liberté d’expression d’une part et le droit invoqué et violé, tel que le droit à ( protection) de la) bonne réputation*.
*Rb. Liège, Département de Liège, 27 novembre 2018, AR 17/3924/A, non publié ; M., SEGERS, P., MUSSO, E., VERRAES, « Pas de bonheur de liberté pour les critiques négatives sur les réseaux sociaux », Juristenkrant 2018, épisode 380, 7.
Si le juge constate qu’il y a eu une erreur de la part de l’examinateur, par laquelle la personne concernée a porté illégalement atteinte à la réputation de l’examinateur par son comportement, le juge doit également déterminer que la preuve du dommage a été fournie. En l’absence de preuves concrètes justifiant le préjudice subi, la demande d’indemnisation devra être rejetée.
Les circonstances factuelles concrètes dans lesquelles un examen/une déclaration a été faite, son contenu et la capacité des personnes/entités impliquées seront importants pour déterminer si sa rédaction constitue une erreur et si elle peut donner droit à une indemnisation.
Si vous êtes confronté à un avis négatif, ou êtes légalement poursuivi en dommages-intérêts à la suite d’un avis que vous avez rédigé, il est conseillé de consulter un avocat pour évaluer les faits à la lumière du cadre d’évaluation ci-dessus.
Source : Bricks Advocaten